Comment faire pour que le brouillard de multiples écritures finisse par la visibilité d’une recherche scientifique fondamentale?
Heureusement, il n’existe pas de meilleures recettes, ce qui nous permet d’inventer les nôtres. Pour le faire, nous avons de nombreuses possibilités d’essayer de retrouver les inspirations pour notre recherche, consistant en nombreuses lectures et écritures.
À mon avis, une des sources d’inspiration se trouve dans nos rituels d’organisation du temps et de l’espace d’écriture.
Avez-vous quelques-uns?
Certains d’entre vous peuvent répondre : « Oui, certainement. J’en ai plusieurs ». D’autres peuvent répondre : « Non, je n’en ai aucun ». Cependant, il peut arriver qu’ils soient devenus tellement habituels que vous n’y faites plus attention.
Le rituel, c’est quand vous vous dites, c’est comme ça et pas autrement. Par exemple, en pratiquant l’écriture vous découvrez que vous ne pouvez « écrire qu’au stylo, à la pointe-feutre ou au crayon, en écoutant ou pas de la musique, en buvant du thé plutôt que du café ou de l’eau, et ainsi de suite » ([1], p. 43).
Un grand avantage des rituels c’est qu’ils peuvent nous « donner des idées et, a minima, [nous] décomplexer à tout jamais » ([2], p. 45). Autrement dit, les rituels d’écriture peuvent nous aider à gérer nos angoisses de la page blanche, de ne pas être à la hauteur, de l’obsession du parfait ou d’autres.
Pour vous laisser réfléchir sur vos rituels, il me semble intéressant de prendre connaissance de quelques rituels pratiqués par des écrivains du XXe siècle.
Notre principe : « les dames d’abord et les gentlemen après ».
Commençons donc par une écrivaine française d’origine russe Nathalie Sarraute (1900-1999) qui ne pouvait travailler « qu’au café en bas de chez elle, sur le boulevard Saint-Germain, assise au même guéridon, chaque matin, dès 9h30. Elle rédigeait sur du papier blanc, sans jamais déchirer une feuille, et à midi rangeait son cartable avant de remonter dans son grand appartement où elle ne pouvait écrire une ligne » ([1], p. 49).
Ensuite, passons aux écrivains qui resteront vivants dans nos coeurs pour toujours.
Claude Ollier (1922-2014), un écrivain français du Nouveau Roman et premier Prix Médicis en 1958 pour La Mise en scène, qui « ne pouvait travailler qu’au dos de feuilles déjà écrites » pour calmer l’angoisse de la page blanche (Ibidem).
William Faulkner (1897-1962), un romancier et nouvelliste américain, qui « aimait écrire le plan détaillé de chaque chapitre sur de grandes feuilles qu’il alignait ensuite sur le mur de son bureau pour mieux s’en imprégner tandis qu’il rédigeait » ([1], p. 52)
Ernest Hemingway (1899-1961), un écrivain, journaliste et correspondant américain, qui « prenait soin de travailler une boîte entière de crayons » (Ibidem) avant de commencer sa journée de travail. Pour lui, « user sept crayons numéro deux représente une bonne journée de travail » (Ibidem).
Et enfin, ceux qui nous réjouissent toujours par leurs écritures.
Alain Finkielkraut (1949), un philosophe, essayiste et académicien français, qui « travaille dans un bureau dont le désordre dépasse l’entendement » ([1], p. 51).
François-Olivier Rousseau (1947), un journaliste et écrivain français, qui « rédige sur une minuscule table installée dans sa salle de bains, pour éviter la présence stérilisante des livres. Au bout de deux ou trois heures, il quitte tout et part se promener » (Ibidem).
En ce qui me concerne, je suis quelqu’un qui n’est qu’une amatrice d’écriture, essayant d’apprendre l’art d’écrire, mais j’ai aussi certains rituels qui m’aident à organiser mon temps et mon espace d’écriture.
Le matin commence par un thé noir, l’après-midi continue par un grand café et le soir par un double expresso, car les meilleures idées me viennent à l’esprit pendant la nuit.
Quand j’écris ou je lis, j’ai besoin d’un silence absolu, c’est pourquoi il est assez difficile pour moi de travailler dans les bibliothèques. Je m’installe devant une table ronde de salle à manger afin d’avoir beaucoup de place pour tous les documents imprimés, livres, carnets, feuilles blanches, crayons et stylos. La table est toujours placée à côté de la fenêtre pour avoir plein de lumière et face à un mur pour éviter toute distraction visuelle. Ainsi, je ne me concentre que sur le processus d’écriture, les livres, mon ordinateur et mes carnets.
La surface de ma table est à la fois rangée et dérangée. J’imprime mes derniers plans et mes dernières notes pour pouvoir dessiner des flèches et des schémas, pour raturer ou remplacer des mots et pour ajouter des idées. Pour atteindre ces objectifs, j’aime travailler avec la version papier.
En outre, j’ai plusieurs livres sur ma table. En les regardant, je me dis qu’il est fortement probable que, tout comme pour moi, pour les auteurs classiques et modernes, le processus d’écriture a demandé « les cinq pour cent d’inspiration et les quatre-vingt-quinze pour cent de transpiration » ([1], p. 73). Cela me rassure. Je ne suis pas la seule.
Tels sont mes rituels accompagnant le processus d’écriture et de recherche.
Et quant à vous, chers lecteurs, quels sont les vôtres?
Bibliographie
[1] TESSARECH, B. (2015), L’atelier d’écriture. Leçons à un futur écrivain, Paris, Éditions Jean-Claude Lattès.